« Poor senseless Bess, cloth’d in her rags and folly,
Is come to cure her lovesick melancholy. »
Ces paroles sont tirées de la chanson « Bess Of Bedlam », composée en 1683 par Henry Purcell, et pourraient servir de manifeste au deuxième album de Fanny L’Héritier qui en a tiré son nom de scène. Bess, nous dit l’histoire, enfermée dans l’asile londonien de Bedlam s’en échappa habillée de ses haillons et de sa folie, et parcourut la campagne pour tenter en vain de guérir sa mélancolie née d’un amour perdu.
Dans Dance until the crimes end, la musicienne lyonnaise construit un édifice de pop folk sophistiqué pour habiller des textes où s’ouvrent les abîmes du féminin. Les folles du titre inaugural « Greenham Woman » sont celles qui, au début des années 80, se sont enchaînées aux grilles de la zone militaire anglaise de Greenham afin d’ empêcher (avec succès) Margaret Thatcher et Ronald Reagan d’y entreposer des missiles nucléaires. Pour ce faire, elles avaient établi un camp réservé aux femmes pendant des mois, et n’hésitaient pas à danser habillées en ours en peluche géants devant les yeux des soldats ébahis, encore et encore « jusqu’a ce que cessent les crimes ».
Avec son complice d’Odessey & Oracle Guillaume Médioni, Fanny L’Héritier tisse une toile complexe pleine de mélodies sinueuses et d’harmonies délicates, racontant des destins de femmes, dans toute leur âpreté et leur puissance. La folie rôde, donc, mais elle est féconde. Mêlant la langue anglaise qu’elle revêt comme une deuxième peau aux influences de la musique baroque, du folk anglais ou de l’Ecole de Canterbury, Bess Of Bedlam trace sa route parmi toutes les folles qui ont osé défricher leur propre chemin.
Bess Of Bedlam sera en concert à l’Opéra Underground avec la musicienne folk canadienne Myriam Gendron le 7 novembre.